29 février 2016

Les gueux et les geeks à l'assaut de la #loitravail ?

par


A défaut d'inverser les courbes, encore une fois, notre clairvoyant gouvernement innove et frappe fort : 

Augmenter les heures de travail des salariés va réduire le chômage. 

Imparable logique arithmétique de l'avant-projet de loi El-Khomri (certes légèrement murmurée par le MEDEF à l'oreille des nigauds gouvernementaux ne connaissant la vie de l'entreprise que via leur brèves excursions biannuelles en tour-opérator sous l’œil des caméras).

Et oui, encore lui, c’est bien ce gouvernement qui a déjà dilapidé 40 milliards (les vôtres) pour acheter 2000 pin’s nous allons créer 1 million d’emplois au dit MEDEF qui se mêle encore une fois d'économie et, pire encore, de temps de travail alors qu'il n'a visiblement que très peu de compétences pour la première et aucune expérience du second. 

Le projet de loi El-Khomri, c'est Orwell,  Philip K.Dick et Francis Veber réunis, avec le gouvernement dans le rôle de François Pignon dans le diner de cons. Sarkozy n'avait pas esquissé la moitié du tiers de ce que ce gouvernement goguenard est en train de détruire au nom du "progrès".

L'avant-projet El-Khomri est le rêve humide à portée de loi de tout ce que la droite n’a pas osé faire au pouvoir (par peur de la rue) en matière d’esclavagisation des masses. De l’idéologie en barre en surfant sur la culpabilisation de l’inactif ? Ça on commence à être habitué : trente ans que l'on vous assène que vous êtes une sous-merde si vous n'avez pas un boulot alors vous avez fini par l'intégrer.  Non, là où les socialistes en carton innovent un chouilla c'est sur la culpabilisation de l’actif. Définition de l'actif : privilégié pas assez productif et trop payé (imaginez que certains à moins de trente ans ont encore quelques euros en poche après avoir payé le loyer de leur colocation, c'est proprement scandaleux). Au passage, j'invite le MEDEF à lire cet article sur ce que coûte au final le "présenteisme" aux entreprises.

 J’ai beau avoir tapé sur les patrons ici même, la plupart de ceux que je rencontre depuis quelque temps (plutôt de la TPE, je reste timide) sont atterrées par la bêtise de cette loi qui ne créera pas un seul emploi tant elle tape à côté. Pire, grâce à elle, les autres boites, les grosses ou celles gérées par des salopards vont pouvoir s’autoriser à être encore plus dégueulasses sous couvert de "modernité" comme dirait Valls  (note que ça rime).  

Résumons à dix ans le paysage social français passé au tamis de la Tchatchérisation sauce Hollande : d'un côté les grosses boites avec leurs armadas d'experts fiscalistes et lobbyistes et qui se goinfreront toutes les aides publiques en pure perte, et les Uberisés de l'autre qui se feront baiser dans tous les sens, trop fiers d'être entrepreneurs (mais à 90h par semaine et sans protection, ce que ne vont pas tarder à devenir les salariés si les porn-libéraux, se servant du socialisme comme diversion pour passer les acquis sociaux au Round-up, poursuivent à ce rythme). Du côté des non-entrepreneurs ce sera plus simple : il y aura les travailleurs qui accepteront TOUT et les chômeurs qui n'auront RIEN. Bref, la société Vallso-macronoEl-Khomrinique ne sera pas celle de Trepalium, mais plutôt cellede Sacdecouchagium: ceux en sac de couchage sous les ponts, et ceux en sac de couchage qui dormiront au boulot.

Vient le bon côte des choses. 

Après ses erreurs, ses cascades de renoncements, de minables calculs politiciens, ces trahisons maladroites, celles assumées, le pouvoir pensait que cette abjection supplémentaire passerait toute seule entre une déchéance de nationalité et un procès de Cahuzac repoussé. Manque de bol le timing est aussi mauvais que le malaise profond : c'était les vacances. Il faut croire que pendant que l’élite de l’analyse économique skie, il ne reste aux crevards, chômeurs ou salariés, qu’une connexion internet pour se défouler. Le pouvoir et ses relais ne s’attendaient pas à une telle lever de boucliers : 8000000 signatures contre la loi travail recueillies sur internet en une semaine : sale coup pour "les modernes".

Ces jours-ci se joue non pas le futur du gouvernement ou l'énième retour de Martine Aubry (ou tout autre détail technique totalement inintéressant vers lequel le microcosme journalistique tend à réduire le débat), mais bien la direction vers laquelle nous voulons que la société aille. C'est plus un choix philosophique qu'économique (en termes d'économie, c'est un non-sens). Au cœur de nos désillusions et de nos abattements, de nos isolements, le passage ou non de cette loi est un test grandeur nature de résistance commune face à la prétentieuse et contreproductive crétinerie des dogmes libéraux. 

Et idéologiquement, ils ont déjà gagné beaucoup trop de batailles.   

[Update 11h59 : Au moment où j'écris cet article, j'apprends que le gouvernement va annoncer un report de la présentation du projet de loi Travail en Conseil des ministres d'après des sources gouvernementales de l'AFP.]>>> Un report n'est pas un retrait. Le combat s'inscrit dans la durée.



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