26 novembre 2008

Zone Interdite aux inactifs

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Alléché par le teaser « Précarité, discrimination, logement : 12 millions de français en danger ! », j’ai visionné sur M6 replay (version VOD de la petite chaîne pour qui sonne le capital), un épisode de l'émission de reportages Zone Interdite s'intercalant entre un numéro sur "la galère des chômeurs obligés de vendre un rein pour nourrir leurs enfants hyper-actifs" et un autre sur "les astuces des français pour manger équilibré avec le contenu de leurs poubelles".

Mise au point.
Après une introduction alarmiste à base de « à plus de 50 ans sommes-nous retirés de la vie active ? » et autres « les seniors français sont en danger ! » calibrant l’émission sur les « seniors inactifs », la roboche-présentatrice (estimation / 25-28 ans) nous annonce une show qui va dénoncer, à travers le parcours larmoyant de plusieurs personnages, ce mal qui ronge le monde du travail : Le jeunisme.

Précisons que je m'intéresserai ici aux personnages de l'émission pour qui la question financière n'a pas l'air d'être prioritaire dans leur quête de travail.

Premier sujet :
Jacques est un empavilloné de 54 ans, totalement désemparé. Licencié après 25 ans de bons et loyaux service dans la même société, il regarde les larmes aux yeux, depuis son beau salon avec commode Raymond Barre intégrée, des balayeurs s’activant dans la rue. Pour Jacques, la vie en dehors de l’entreprise, c’est la vie dans la maison donc la vie en prison.

Dans son jardinet, après une longue complainte sur son manque d'activité (activité signifiant ici : recevoir des ordres d'un patron) et poussé dans ses derniers retranchements par l’intervieweur, Jacques reconnaît « 25 ans de gâchis » sans pleinement réaliser le paradoxe dans lequel il s'embourbe. Pleure-t-il le fait de ne plus avoir de travail ou le fait que sa vie n’est rien sans travail, précisément parce qu’il n’a fait que travailler, n’ayant rien cultivé d’autre pendant un quart de siècle que sa ponctualité et sa dévotion la plus complète à une entreprise qui a finit par le virer ?

Houlala, comme dit la femme de Jacques : "ça cogite dans la tête."

L’idéologie dominante des deux heures d’émission est condensée dans ce premier sujet par un commentaire pour le moins orienté : Pour prétendre au statut d'être humain et ne plus être un sujet de dissection sur M6, autopsié une deuxième fois chez Seb Musset, un boulot tu dois trouver !

Autre pavillon tout confort, avec plasma HD Maybe et master canapé en croûte de cuir : Martine, ex-vendeuse de chaussures de 43 ans, « stresse d’être sans travail ». Elle astique encore et encore son beau carrelage au Mirror car « ça l’évite de réfléchir à sa situation un peu lourde » et de trop penser « sinon [elle] crie sur les enfants.» Son fiston, Steven, absorbé par son Pro evolution soccer sur Ps3, la rassure en haussant les épaules : « Mais m'man, t’es pas vieille.» avec un sourire chaleureux. Mais, le mioche cache bien son jeu. Lui aussi a été atteint du virus de "la petite maison dans la prairie" et il confie en apparté à la caméra un "Si elle travaille pas,' j'serais pas fier d'elle" qui me fait froid dans le dos.

Martine, licenciée pour cause de vieillesse via un prétexte fallacieux, n’a pourtant jamais manqué un jour à son poste, une occupation répétitive et répétée durant 27 ans tuant chez elle imagination et curiosité et qui, maintenant qu'elle ne l'a plus, l'abandonne au néant d'une vie à continuer.

Après quelques péripéties d’intérieur sur une glauquissime ritournelle ressemblant à s'y méprendre à celle d'Elephant Man, on retrouve Martine devenue auxiliaire de vie dans une maison médicalisée de services à la personne (comprendre femme de ménage dans un mouroir) où, parce qu’elle se montre motivée et parce que les caméras de M6 sont moins discrètes que celles des "Infiltrés", on lui "offre" un CDD de 2 ans. Martine renaît. Suit un clip où on la voit s’activer sur une musique guillerette signée Vladimir Cosma (NDLR : un éléphant ça trompe énormément) aux mêmes taches ménagères qu’elle faisait chez elle mais pour le compte d’un patron qui la paye au smic horaire. Victoire ! Commentaire éclairé du speaker « Martine a eu le bon réflexe ! » Quel réflexe ? Celui de choisir un job peu gratifiant et mal payé et d’abandonner ses trois enfants à la Star Ac' et à la Xbox ? C'est donc ça l'émancipation. Martine n’aurait-elle tiré aucune conclusion de sa mésaventure ? Peut-être que la diffusion de Zone Interdite l’aidera : Si l'on suit la logique du commentaire qui, deux minutes avant vantait le volontarisme de cette employée modèle qui ne l’a pas empêché d’être jetée comme un vieux slip, elle a toutes les raisons d'être l'invitée dans deux ans d'un nouveau numéro spécial « les trahis des contrats de professionnalisation ».

La reportage dépressionnaire continue avec un troisième sujet que dans le jargon professionnel des décrypteurs d'émissions à la con d'M6, nous appelons le sujet "Over the Top". Olivier, 45 ans, est un cadre commercial au chômage depuis 6 ans. Première question : Est-il encore, après 6 ans en marge de l’action, "cadre" et "commercial" ? Deuxième question : Que vient-il faire à 45 ans dans un reportage sur les déboires des seniors ? N’aurait–il pas plutôt sa place dans une étude sociologique sur la considération du travailleur en général dans un monde
déshumanisant basé sur le rendement qui, le soumettant à des objectifs toujours plus poussés, l’amènera inéluctablement à en être dégagé manu-licenciari ? Malheureusement, M6 ne fait pas ce genre d'enquête subversive.
Olivier, plaqué par sa femme, glisse au bord des abysses : « Pourquoi on ne veut pas m’engager, mince qu’on me le dise quoi ? » C’est pourtant simple Olivier : Dans cette société compétitive que tu ne remettais pas en cause tant qu’elle te versait 7000 euros par mois, l'employeur préférera toujours un jeune lobotomisé, malléable et courageux, qu’un vieux de 35 ans qui, pour peu qu'il ne regarde pas trop M6, commence à conceptualiser sur sa vie passée à la fuir.

Le cas d'Olivier est presque irrécupérable : Il ne "supporte plus de ne pas mettre de cravate". Rongé par son inoccupation, entre peur et culpabilité, n’ayant en 6 ans jamais réaligné son logiciel d'évaluation du monde (preuve télévisée à l'attention d'éventuels employeurs qu'il est tout sauf "flexible"), l’homme fonctionne encore selon les preceptes "moraux" de l’entreprise et se considère donc, puisque sans travail, comme un sous-homme.

Devant un tel naufrage intérieur, un pote patron lui « laisse sa chance » : Olivier va pouvoir nettoyer les chiottes du camping que son ami gère. Youpi ! Le cadre commercial s’exécute, enjoué et super motivé, pour l’amour du travail bien fait. Le soir, ponctuel car « [il se doit] d’être présent », il entame un inventaire dans un hypermarché sous les ordres d’un petit-chef moitié moins âgé que lui, stagiaire précaire il y a encore 2 ans et senior sur la sortie d'ici 2010.

Olivier conclut le sujet qui lui est consacré par un « c’est épuisant ce travail mais ce serait épuisant de ne pas en avoir » qu’on croirait directement soufflé par la division "argumentaires en béton" coachant Xavier Bertrand, Christine Lagarde et Yves Jégo.

Retour sur le plateau de la jeunette :
« En France, il y a 200.000 seniors qui cherchent un emploi ». Mazette. La gamine insiste : "Le vrai problème, c’est la discrimination par l’age." Sûr que dans un pays qui embauche déjà peu et qui vieillit à vue d’œil, à un moment ou à un autre, comme dirait le caniche au doberman, ça va coincer. A ce stade-ci, comprenons que le terme "senior" est un alibi sémantique regroupant des disparités d’âges et de situations n'ayant en commun que le traitement idéologique que M6 en fait : Ces gens
sont malheureux puisqu’ils n'ont pas de travail. CQFD.

L’entreprise, la grande absente des reportages, est piégée en flagrant délit de contradiction : D’un côté, elle veut des jeunes, moins payés, car moins expérimentés, donc moins productifs. Dernier argument qu'elle sort également aux seniors pour les virer ou ne pas les embaucher. Comme il est hors de question pour l’entreprise de se remettre en question, et encore moins de le faire à la télé, c’est donc aux "seniors" (et l’on voit que la définition d'M6 est large) de faire des efforts.

La jeunette sur plateau désigne comme « parias du monde du travail » cette nébuleuse post-quadra, déboutée d'un salariat qu'elle imaginait pépère et à perpétuité. Bienvenue au club ! Des "parias" du monde du travail, j’en connais un paquet qui sont baladés d’un emploi pourri à l’autre depuis 20 ans dans le mépris le plus complet de leurs ainés.

La première partie de l’émission s’achève sur une note d’espoir. Nous retrouvons Jacques, le neurasthénique, à deux doigts de réaliser son rêve : Ouvrir une baraque à frites. Merci la micro entreprise et Dany Boon, grâce à qui ils sont aujourd’hui 3 millions à avoir eu la même idée cette année ! Ça va puer le graillon sur le littoral cet été !

Page de publicité de mi-programme :
Cepelem, avec toute sa thune à règlement différé tu l’aime. Le crédit Agrippé, le pouvoir de dire « on va encore t’en piquer ». Cashdébil, la réserve de cash disponible à tout moment quant t’as envie de t’acheter une 306 cabriolet en plus de ta botte de persil. Revolvingo, le crédit malin qui te permet de payer 20 fois son prix et pour toute ta vie ta twingo à toi toute pourrie et, Bieritude, la convention obsèques pour quitter en toute mensualité cette vie de chien dont même un chien ne voudrait pas.

Retour dans le gros dos' de la Zone Interdite plutôt fréquentée.
Je vous présente Joseph, 84 ans, chauffeur routier. Parce que sa retraite « ne suffit pas » (à mon sens parce qu’il ne supporterait pas de rester
à domicile en tête à tête plus d’une heure avec sa bourgeoise), il conduit quotidiennement son 33 tonnes sur les départementales de France. Avec pour seul repas une madeleine et bol de riz, le vieux bourlingueur qui "ne supporterait pas de raccrocher" attend le pied sur le champignon son AVC pour prendre son car scolaire de plein fouet (ça fera toujours de belles images au 6 minutes d'M6). Et tout ça pour le mirobolant pactole de 1000 euros par mois (soit le tarif facturé pour 1 seconde de publicité sur la chaine qui diffuse le sujet).

Au fur et à mesure des portraits et malgré mon cynisme qualifié « d’enc... » par mon entourage, je suis ému par ces vies entièrement focalisées sur le travail. Travail considéré ici non comme un épanouissement personnel mais bien comme une agitation nerveuse visant à tromper l’angoisse existentielle. Cette émission fourre-tout sur les seniors, visant à servir la communication d’un gouvernement ayant dans le collimateur l’euthanasie pure et simple du départ à la retraite, est un plaidoyer involontaire pour l’édification d’une vie en retrait, préservée du carnage cérébral que provoque toute immersion prolongée dans le monde du salariat.

Et oui,
dans son foutraque d'émission propagandiste M6 a mis le doigt sans le vouloir sur le point faible de notre organisation sociale axée pour moitié sur le travail (l'autre étant la consommation) : Son effet dévastateur sur l'intellect et le moral de l'individu. Le seul point commun entre un cadre commercial de 41 ans qui récure des latrines de campeurs pour tromper sa solitude et un chauffeur de 84 qui décharge à la pelle des camions de céréales pour rester loin de sa bourgeoise, est la terreur du vide. Conditionnés par un environnement, une éducation, des médias type M6, voués au marché et n'acceptant aucune dérogation "au moule", ils ont par circonstances ou facilité, souvent les deux, placés toutes leurs billes existentielles dans un système qui n’a que faire d’eux. Sans matelas spirituel, sans endurance mentale, son développement de relations autres que professionnelles, parfois sans hobby ni passion, ils se retrouvent anéantis, isolés, dès qu'on leur retire un travail salarié. D'où ces classiques et toujours poignants "cette usine qui ferme c'était toute ma vie" qui jonchent les reportages de JT depuis 30 ans. Pourtant, même quand ils en sont exclus et qu'il s'est ouvertement moqué d'eux, leur dévotion à ce système reste inébranlable. La machine, elle, ne voit en eux qu'une ligne comptable, une variable d'ajustement, ajustée jusqu'à ce qu'elle sorte du seuil de rentabilité.

Je passe en vitesse sur le risible sujet de fin titré "la revanche des seniors aux Etats-Unis" qui fait l'impasse sur la majorité des seniors américains n'ayant d'autre choix que de travailler
jusqu'à la mort dans un pays où le concept de solidarité est un gros mot, pour nous présenter deux belles caricatures de retraités volontaires : Sally, la caissière et Robert le contremaitre, respectivement 85 et 102 ans, vraisemblablement conservés dans leurs entreprises pour leur potentiel publicitaire.

Que retenir d'une telle émission ? Évidemment, on ne peut être que sensible à ces aveux d'impuissance. Évidemment, on envie de concéder à Joseph qu'il est surement plus heureux dans son camion qu'avec sa femme. Évidemment que Martine est surement plus utile à ses petits vieux qu'à ses enfants. Évidemment, il est bon pour tous, et pas seulement pour l'entreprise, de mixer les âges. Il n'en reste pas moins que le fond du malheur distillé durant ces deux heures de programme tient moins à l'âge qu'aux rapports de soumission et d'identification complète de l'individu à son emploi salarié.

Je ne critiquerai donc pas le fait de travailler à tel ou tel époque de la vie du moment que ce n'est pas vécu comme une fatalité tel que le confesse Joseph au travers d'un "c'est comme ça" dépité en bouffant son riz au lait. Non, j'attire ici l'attention sur les arrières-pensées d'une chaîne de télévision qui distille, émission après émission, au travers de la dictature de cas particuliers, l'idée qu'il est mal de ne pas travailler, surtout lorsque l'on est âgé.

Zone Interdite présente du malheur en barre et y apporte une solution : Celle qui arrange le marché.

Ces émissions, classées "informatives", ne sont pas innocentes. Il faut les regarder non pas pour ce qu'elles sont censées nous démontrer mais pour la façon dont elles tentent de nous le démontrer. Ne jamais oublier que le canevas de fond de ce type de show (qu’ils soient sur l’immobilier, l’éducation ou le travail) est de conditionner l'audience par la terreur de l'exemple, pour que ceux qui sont déjà dociles continuent à l'être et que ceux qui ne sont pas assez conformes s'empressent de le devenir.

J'attends naivement ce jour où des médias instruiront en amont leurs spectateurs à remplir un peu moins leurs salons et un peu plus leurs âmes afin d'éviter qu'ils ne deviennent ces désœuvrés de l'esprit toujours plus nombreux, ces exclus du monde « gagnant-gagnant » et unilatéral de l’entreprise qui, une fois jetés, vivent leur quotidien comme une peine.

Si l'homo-salarius ne veut pas finir à la benne, le moral dans les baskets, à lui de cultiver autre chose, au plus vite, au plus jeune, en marge ou en parallèle.

24 novembre 2008

Splendeur et misères du peuple objet

par
L'hiver est en avance, le grand décompte du téléthon de l'indifférence a commencé, le gros rouge et les tentes Quetcha sont de sortie, le standard du 115 est en place pour que, vous aussi, puissiez dénoncer en tout anonymat le SDF qui ruine la réputation de votre rue...

Et bien non pas cette année !


Faute d'un état un peu burné, dont le triste chef a encore été prit en flagrant délit video de mensonge lorsqu'il s'engageait en 2006 à ce qu'il n'y ait plus un seul SDF d'ici deux ans*, cette fois c'est la justice qui donne le ton des festivités !

Le tribunal de police de Paris inflige ce 24 novembre deux amendes aux associations Droit au Logement et les enfants de Don Quichotte (respectivement 32.000 et 1875 euros) pour avoir dressé des tentes pour les sans-abris dans les rues de la capitale (dont rappelons-le des centaines d'immeubles appartiennent à des banques ou des fonds spéculatifs et restent inhabités depuis des années, sans parler des bâtiments appartenant à l'église).

La peine est relative à une "
infraction de 4e catégorie pour avoir embarrassé la voie publique en y laissant des objets".


Le même jour, et parce qu'il en va du "rayonnement international de La France", Philippe Seguin, président de la Cour des comptes, dépose un rapport alarmiste au Premier Ministre : La France est à la traine des autres pays, elle manque cruellement de stades de football de grande capacité. Le chiffre de 8 est avancé.

Reconnaissant au football une dimension religieuse, Séguin insiste : "Cet état de fait oblige à l'ambition et au perfectionnisme."

Le type sans toit,
frigorifié sur le bitume, qui ne joue pas à la baballe et ne rapporte aucune devise, est lui prié de ne pas agoniser dans le chemin.

En y réfléchissant un peu... D'un point de vue logistique, les maxi-stades présentent cet avantage (non précisé dans le rapport) que, entre deux coupes du monde, on peut y stocker préventivement et de façon massive, toute les ultra-gauchistes qui menacent l'hexagone.

Je retire ce que j'ai dit : Cet état est vraiment prévenant avec ses objets, pardon, ses sujets.



* Il fallait évidemment entendre : "je m'engage à ce qu'il n'y ait plus un seul sdf dans mon champ de vision d'ici deux ans". Les experts en sarkozisme auront rectifié d'eux-mêmes.

21 novembre 2008

"Autoentrepreneur", une soft-délocalisation de l'intérieur

par
Entre la retraite "optionnelle" à 70 ans et la "possibilité" de travailler le dimanche, on ne parle que trop peu du "dispositif de l'auto-entrepreneur" lancé par Henri Novelli, secrétaire d’état chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyens entreprises. Ce dispositif entrera en vigueur le 1er janvier 2009 mais le site vient d'ouvrir histoire de jauger la demande.

C'est vrai que, pour une fois, ce nouvel artifice
made-in-UMP à la puissante sémantique progressiste à base de "prenez votre destin en main" n'enlève rien à personne et que l'on ne trouvera donc aucune organisation syndicale pour défiler en exigeant son retrait. Jugez plutôt : l'auto-entreprise "permettra aux salariés, chômeurs, retraités ou étudiants de développer une activité complémentaire pour augmenter leurs revenus".

L'esprit facile, le nigaud Druckérisé à la sauce Chazal, Steevy, les habitants de Levallois-Perret, la femme de rentier, en résumé l'électeur sarkoziste y verra une preuve supplémentaire du modernisme de notre gouvernement, une
nette avancée sociale .

J'y vois, comme toujours avec ce genre de projet patiné des heures au service marketing, tout ce qui n'est pas marqué dans la plaquette : La possibilité, dans un deuxième temps, pour ceux qui ne sont ni salariés ni chômeurs (j'en connais), ceux qui n'auront jamais de retraite (j'en connais beaucoup et qui pourtant travaillent), ceux qui seront licenciés (vous allez en connaître énormément) de pouvoir "croûter un peu", en langage d'état ça veut dire : De payer des impôts comme les autres.

L'esprit un peu critique, et donc conscient de la déliquescence sociale
et républicaine de son pays, s'arrêtera lui sur ce paradoxe : Comment une société qui stigmatise la libre-pensée peut encourager "l'auto-entreprise" sans, au minimum, avoir une arrière-pensée si ce n'est idéologique au moins mathématique ?

Loin de moi l'idée de critiquer "les petites entreprises" qui ne manquent que trop à notre pays, rappelons-le créateur à ses heures de gloire et avec la bénédiction du Général De Gaulle de l'hypermarché global (un concept inédit ailleurs sauf là où La France l'a importé), déférant de tradition envers les grosses compagnies. Précisément, l'auto-entreprise d'Hervé Novelli ne propose pas d'aider à la création de petites entreprises mais de faire de l'individu, assoiffé de liberté et grisé par le désir "d'être patron", une entreprise solitaire sans salariés donc sans syndicat ni protection, sans possibilité de contestation (à qui se plaindre ?) bref un truc ultra-capitaliste où il sera, tout libertaire qu'il se pensait, le tyran de sa propre torture, lâché et soumis à la concurrence d'autres comme lui qui le contraindront à en faire encore plus pour toujours moins.

Encore plus fort que l'oppression par l'entreprise (elle-même dans une mauvaise passe), voici l'introduction soft d'une nouvelle forme d'oppression sans même avoir à créer d'entreprise : Une vraie délocalisation de l'intérieur !


Autre que l'on voit qu'il s'agit pour lui dans un premier temps de récupérer via la taxe une part du business de ceux qui s'arrondissent les fins de mois sur EBay de façon un peu trop courbes, l'état, constatant les limites de "La France de propriétaires" profite de "la crise des américains sans morale financière" pour faire franchir une nouvelle étape au corps social en "offrant à chacun la possibilité d'être son propre patron".

Puisqu'il n'y a pas de travail, devenez votre patron : Logique.

Mr Novelli, permettez-moi d'être sceptique : Votre "vertueux" système à bien créé des "travailleurs pauvres" alors pourquoi ne créerait-il pas des "patrons précaires" ?

Merci donc pour vos offres gracieuses mais subsistant sans trop travailler depuis 18 ans maintenant et ayant survécu
à un krach immobilier sur la base du non-respect des conseils de votre mentor, je me considère déjà comme un bon auto-gestionnaire de l'entreprise Seb Musset.

Dans
« Misères du présent, richesse du possible »*, André Gorz revient sur cette mystification des "possédants" lorsqu'ils vantent au Tiers-Etat les mérites du self-entrepreneuriat :

« L’image du « travailleur » à son compte qui est « son propre patron » séduit 40% des jeunes britanniques qui déclarent vouloir être payés selon leurs capacités et leurs mérites, non selon un barème préétabli. La plupart découvriront rapidement leur mystification. Seuls, en effet, tirent leur épingle du jeu les indépendants qui appartiennent à « l’élite du savoir » (elite of knowledge workers) dont parle Jeremy Rifkin. Ils représentent moins d’un 1% des actifs : consultants, avocats d’affaires, informaticiens et experts de haut niveau. Pour celles et ceux qui ne sont pas réputés pour des compétences exceptionnelles recherchées par les entreprises, le travail indépendant ne sera source d’une plus grande liberté que dans la mesure où indépendants, chômeurs, précaires, temporaires réussissent à s’organiser en pool à l’échelle de leur bassin d’emploi. [ …] En l’absence de cette auto-organisation pour laquelle il n’existe que de rares exemples embryonnaires, le post salariat signifie seulement que les entreprises sont libres de pêcher, dans un abondant réservoir de prestataires de services de tout genre, celles et ceux qui offrent le meilleur service au prix le plus bas."

* éditions Galilée, 1997.

19 novembre 2008

Avoir ou ne pas avoir la carte

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1 / AVOIR LA CARTE :


2 / NE PAS L'AVOIR :

Remarquez dans le cas 1 comme on peut, tout en travaillant au Figaro et cumulant plusieurs piges par semaine à la télé à un SMIC la prestation, assener en toute décontraction n'importe quelle connerie. Compte-rendu critique ici et enquête là.

Notez dans le cas 2 comme on est, au mieux, un répugnant sujet de conversation.

18 novembre 2008

La bande à bedaine

par
Observés hier à 21h02, Place de la Concorde, au croisement de l’Avenue Gabriel et de l’allée Marcel Proust, deux flics armés se les gelant sévère pour encore toute une nuit sous le grésil.

Ils sont en faction devant six cars des forces de l'ordre postés en réserve en cas de remontée gastrique, populaire et soudaine, sur ce Palais de L’Elysée qui monarchise à 150 mètres de là.

Le plus vieux des deux Mister Freeze se penche vers son cadet, un novice. D’une voix grave, la main pas loin du flingue, il s'inquiète :

LE VIEUX FLIC
Et toi Le Soldat Rose, tu l’as vu ?


16 novembre 2008

Le meilleur du monde (y a-t-il trop de jours de commémoration pour notre président ?)

par
Sachez apprécier les boucles télévisuelles des droïdes de l’UMP, les Léfebvre, les Chatel, les Jégo, les Copé qui occupent à tour de rôle les plateaux télévisés pour vous expliquer au milieu des ricanements complices d'animateurs achetés et d'un public maté pour ne pas se réveiller, qui sert de tapisserie à applaudir, qu’il n’est pas politiquement correct de ne pas être d'hyper-droite, que la jeunesse et l'étranger (quand ni l'un ni l'autre ne viennent de familles fortunées) sont des menaces à ficher, qu'internet est un repère de terroristes, pédophiles et syndicalistes à mater à coup de décrets et qu'une éducation inadaptée aux offres du marché est le terreau de futures incivilités.

Et quand ils essuient, débonnaires, l'excès de propagande encore collé aux semelles de leurs Weston sur vos têtes passives d'esclaves décervelés, sachez lire entre les grosses lignes HD que, tôt ou tard, tout ce qui n’est pas Sarkozy-Ready finira au Stade de France et pas pour voir des matchs.

Savourez une propagande journalistique inégalée depuis les plus beaux régimes bananiers ! Dégustez une censure qui n'a plus à venir d'en haut, tant chaque maillon du contrôle de l'information, les roboches, affidés et mouilles-pantalons, sont génétiquement programmés pour la faire remonter d'eux-mêmes en kiosque ou à l'antenne.

Appréciez ce travail d'orfèvre, certes plus grossier le week-end (car avec moins de salariés et plus de stagiaires), des chaînes télévisées d'information continue puisant leurs accroches directement dans les gros titres du Figaro de Dassault pour célébrer les avancées historiques de notre Sauveur de Président, Mr Smith à Washington, qui fait quelques courses de popularité au G20 de son quartier avec les grands de ce monde, vous savez ceux qui l'ont pillé.

Voyez comment le titre d'après, les attachés de presse évoquant la mise en examen
de "terroristes gauchistes" dont le seul crime avéré est d’avoir des idées et des bibliothèques qui ne sont pas celles du gouvernement, reprennent via les bouches ouateuses de meufs canon à la diction douce, les mots tamisés d'une plaquette marketing UMP pour l'instauration sans douleur, voire dans le soulagement populaire, de lois totalitaires.

Si vous n'appréciez pas tout cela, de deux choses l'une :

- Soit vous êtes déjà cliniquement mort.

- Soit, vous aussi, vous avez encore un peu d'esprit critique et de grandes chances de devenir tôt ou tard un "ultra-gauchiste" et, à l'étroit dans ce rêve bleu, de vivre des années de terreur.

Pour ma part, comprenez pourquoi, puisqu'en France les mots ont la valeur pénale de bombes, de plus en plus souvent j'utiliserai la fiction pour affirmer que, non vraiment non, ce n'est pas retarder des trains qui fera avancer la cause.


Fiez-vous à votre instinct ! Dans ces temps de régression à peine voilée où tout contre-discours est voué à être marginalisé au milieu des rires de petits comités de plateaux puis étouffé dans l'indifférence générale par le législateur, c'est l'arme d'autodéfense la plus adaptée et la plus efficace.

Et désobéissez ! Enfin, si vous m'avez lu jusque là au lieu de vous taper le journal télé, c'est que vous avez déjà commencé.

Update 17.11.08 : extrait de l'interview d'Eric hazan, editeur de "la cellule invisible" par Mediapart

12 novembre 2008

Elle avait les yeux revolving

par

Elle avait les yeux revolvingromance sociale sur fond de crise signée Seb Musset.

C’était dans une autre galaxie, à une autre époque, en 2004 dans la banlieue bourgeoise de Douai. Cela commençait comme ça, suite à un trop plein de télé, dans les rêveries Conforamatées d’une étudiante en droit.

Juliette avait 21 ans et des ambitions plein la tête.

Des envies de vie rêvée, le songe d’un bel ensemble de linge de maison blanc signé Deschamps, la projection d’une commande massive de macarons chez Lacarie pour le baptême de son futur bébé qu’elle voulait blond, la possibilité d’un appartement spacieux autour du berceau sophistiqué, avec une terrasse pour bruncher le dimanche accompagné de gens de bon goût puisqu’ils auraient le sien.

Après un bac brillamment décroché mention comme les autres, des années rébarbatives de droit suivies d'une maîtrise, Juliette pensait de plus en plus concrètement à sa vie d’adulte qui, à en croire Cofidicte, semblait à portée de mains. Elle y serait heureuse dans une maison comme celle de ses parents, mais bien à elle, avec un salon plus « dizaïne ». Pas un soir où elle ne s’endormait sans songer à son canapé géant pour siéger dedans.

Ses parents, deux médecins généralistes du Nord, tranquilles financièrement, baby-boomers évidemment, l’avaient habituée au confort moderne sans pour autant lui donner l’impression d’avoir eu à travailler énormément pour l’obtenir. Juliette avait toujours eu un épais sofa sous le cul au cœur d’un beau living-room lui même lové dans un grand pavillon entouré de son jardin paysager au gazon rasé.

Elle avait expérimenté, les unes après les autres, les conversions familiales systématiques (si possible avant le voisin) à toutes les avancées scientifiques qu’offrait, pour les nantis, ce monde de progrès : Premier magnétoscope VHS, premiers Laserdisc suivi cinq ans avant tout le monde du premier lecteur dvd.

Tous les soirs dans son palais du Pas-De-Calais, petite Juliette regardait Madame est Servie en rêvant de devenir Angela Bauer. Son adolescence fut ensuite bercée par Friends. Dans la sitcom new-yorkaise, Juliette admirait ces jeunes femmes indépendantes, volontaires et totalement soumises au marché qui en quelques saisons, et presque sans coucher, transformèrent tous les mecs de la série (ceux pas encore totalement trépanés comme ce brave con de Joey) en fiottes pathétiques toujours prêtes à ramper.

Le succès de Bienvenue chez les Ch’tis quatre ans plus tard sonnera d’abord la revanche des petites gens. Pour beaucoup de notables de Flandre, c’était (et c’est toujours) une tare de vivre au pays des chicons et des betteraves. Vivant la région comme pas assez Rotary et surtout trop pleine de pouilleux crottés, pour leur fin de cinquantaine libérale, les parents médecins s’exilèrent dans le sud pour finir en beauté parce que les vieux là-bas ça a plus de blé.

Juliette se devait d’être avocat, juriste ou quelque chose qui ne ferait pas pâlir de honte ses géniteurs dans les dîners mondains de l’arrière-pays provençal où les deux vivaient maintenant dans une villa au sommet du lotissement, le Xanadu du CSP+. Juliette, pressée d’être indépendante comme ses amis virtuels du Central Perk, était bien au fait que pour habiter dans un bel appartement parisien, avec des parents plus radins qu’il n’y paraissait et inconscients des tarifs en vigueur dans l’immobilier, il lui fallait vite obtenir plus de blé.

Se contentant d'une chambre de bonne sur Paris, bien en dessous du standing auquel elle prétendait mais au loyer entièrement réglé par papa et maman, Juliette officiait dans une étude en contrat précaire à trier du dossier pour des avocats en charge de défendre les couples confrontés au surendettement.

Vite fait bien fait, pour améliorer son quotidien, elle sélectionnait Pierre. C’était un gentil qui terminait peu motivé ses deux années dans une école de commerce de moyenne qualité dans laquelle pourtant se ruinaient des parents qui croyaient dur comme fer que quand on pouvait il n’y avait plus qu’à vouloir. Ce chic type ne demandait rien à personne mais, paradoxe du manque d’imagination en milieu social non-dévafavorisé, étant fatigué de sa vie de famille, il voulait fonder… sa famille. A 22 ans, à peine avait-il eu le temps de se prendre trois râteaux pour se faire une idée de la sexualité que c’était réglé : Avec Juliette au propre comme au figuré, il sautait sur la belle affaire.

Devant la pénurie de lofts new-yorkais disponibles à la location sur Paris, surtout dans les limites de leur maigre budget, Pierre et Juliette se rabattirent sur la banlieue mais pas n’importe laquelle. Ils trouvèrent sans difficulté, avec la caution parentale des deux familles, un mini deux pièces à Levallois-Perret qu’ils gavèrent de meubles et de bibelots trop mignons selon les dernières prescriptions de Question Maison !

Ce fut le théâtre d'un long et intense bonheur de quatre mois.

Au printemps, Juliette voulait se marier : Le prêt pour l’accession à la propriété serait ainsi plus facile à décrocher.

- Ah bon faut acheter ? Demanda interloqué Pierre qui malgré son BTS force de vente bouffait encore ses crottes de nez en ricanant devant Cauet sans avoir d’idées arrêtées sur la tournure des années à suivre.

- Oui le 30m2 carré pour deux y en a assez ! J’ai de l’ambition, je veux mon appartement à moi, je veux pas faire comme tes cons de parents qui a 55 ans sont toujours pas propriétaires ! Lui répondit Juliette de cette voix de crécelle propre aux pétasses pas prêtes à se laisser faire.

Pierre laissa parler cet instinct émancipateur, guidé par son slip et les émissions d’M6, voulant s’affranchir à jamais de la tyrannie de son intolérable condition sociale de pas-propriétaire :

- Oh oui tu as raison, c’est vraiment des cons mes parents, en plus ils ont eu cinq enfants pouvaient pas faire attention ! Allez baisons maintenant !

Tandis qu’il besognait sa poupée gonflante sur la déserte branlante Borkaasé de chez Hic et Ah !, premier objet d’une série encombrante mais coordonnée de tables basses achetées en douze fois sans frais, Pierre compris que sa paye pourrave de vendeur en forfaits téléphoniques n’y pouvait suffire : Juliette devait elle aussi gagner plus de blé. Il fallait se donner le moyen de leurs ambitions s’ils voulaient égaler la réussite matérielle de leurs parents. Pour le couple, évidemment, cela ne pourrait aller que mieux : Ils visaient pour leurs 25 ans, une vie au mélange harmonieux de Friends pour le côté artiste, fun et femme libérée avec Madame est Servie pour le côté cadre, Connecticut et homme de ménage.

Isolée dans l’indépendance du deux-pièces de Levallois-Perret où vite tout devenait ennuyant (et surtout pas assez grand) et parce que sortir ou s’amuser nécessitait plus de blé, Juliette eut la nostalgie de son enfance et de ses parents.

Une fois marié en grandes pompes dans un château loué pour la modique somme de six mois de salaire par les parents de Pierre, surnommés dans l’intimité des amoureux ces connards de locataires, le couple uni pour la vie et les crédits ferait en une et même passe le grand saut tandis qu’il couperait le cordon : Pierre et Juliette s’installeraient donc dans le Sud, le plus près possible des parents de la jeune femme. Cette dernière prétexta qu'elle avait décroché dans la région un important travail en CDI qu’elle se montrait pourtant évasive à détailler.

Le couple choisit en un après-midi un F3 sans charme en troisième banlieue d’une ville moyenne des Bouches-du-Rhône peuplée de retraités (la ville et l’appartement) mais offrant le principal avantage d’être à moins de trente kilomètres de la villa avec piscine des parents. Le couple s’éviterait des frais supplémentaires de vacances. Et puis…

- Tu te rends comptes Pierre, pour la taille c’est tellement moins cher qu’à Paris !

Au moment de signer pour trois cent soixante mensualités puisque les deux n’avaient pas l’ombre d’un billet à avancer, Juliette eut ces mots qui rassurèrent le mari un tantinet chahuté pour le chambard qu’en moins d’un an la belle affaire avait imposé à sa vie d’étudiant pépère :

- De toutes les façons dans trois ans on revend et on rachète une maison avec jardin et piscine plus près de chez mes parents !

Quand je l’avais au téléphone, Pierre, qui avait du flair, étalait même une certaine confiance :
- On a des projets, ça brasse bien dans le coin, d’ici deux ans on va ouvrir une agence immobilière et faire plus de blé !


En attendant, cette graine d’ambition accepta sans broncher ce salaire, pourtant mauvais, de guichetier dans une succursale bancaire (celle là même auprès de laquelle il empruntait pour une vie de revenus) à moins de 1h30 d’embouteillages de son immeuble pour seniors.

Ce boulot austère vers lequel Pierre roulait sa peine chaque matin entraîna un imprévu amer : L’achat d’une automobile de couleur prune et de marque Citropeine. Certes ce n’était pas le roadster de ses rêves mais, entièrement financée à crédit (comme d’ailleurs le reste de la salle à manger, du vaisselier, des deux canapés et des trois lits d’amis), le couple en fut satisfait trois mois gratuits, comme prévu par la publicité, avant de sentir l’addition passer.

C’est début 2007 que pour la première fois Pierre fit attention à ce qui lui restait sur son compte en fin du mois, c’est à dire moins que moi qui pourtant ne travaillait pas. Au terme du premier trimestre, la fin mois arrivait avant même de commencer.

Pierre mit quelques courses à l'hyper pour reconnaître la situation. De la viande à chaque repas, le couple d’aspirants bourgeois devenu classe laborieuse sans s’en apercevoir, était passé aux nouilles deux fois par jour puis aux coquillettes discount avant qu’il n’abandonne purement et simplement l'hyper pour d’autres enseignes moins avouables et moins bien climatisées.

Cette vie d’indépendance ensoleillée coûtait plus cher que Pierre et Juliette ne le pensaient et dans le même temps, pour l’atteindre ils avaient perdu toute liberté : Obligés de pointer dans des jobs pas glorieux et mal payés, de bouffer du féculent périmé dans leurs belles assiettes art déco, dilapidant leur maigre épargne dans l’achat de gadgets inutiles qui donneraient l’impression à leurs collègues de bureaux qu’ils étaient toujours en tête dans la course des happy-fews. Cette dernière occupation cannibalisait leur temps libre et les stressait au plus haut point, chaque visite en hypermarché devenant un parcours de torture aux milles privations.

Sans compter que pour Pierre il fallait désormais se taper tous les dimanches chez les beaux-parents, y être le témoin passif de leur opulence domestique, suivi sur le chemin du retour des réprimandes de Juliette concernant son salaire de mari de compagnie, pas assez élevé pour permettre au couple d’avoir le train de vie de leurs aïeux.

Pour se réconforter, sur ses trajets matinaux quotidiens, tout en éveillant sa conscience politique à la seule écoute de Jean-Jacques Bourdin, Pierre se répétait qu’au moins le climat de sa région était agréable et qu’il ne s’en sortait pas trop mal puisque lui et Juliette n’avaient pas d’enfant. A peine eut-il intérieurement finit sa phrase que sa partenaire de contrat matrimonial, pompadouresque sur son siège passager, lui tendit un petit emballage cerclé de rose. Le coup de frein à main fit crisser les pneus de La Soxa qui stoppa nette devant le bureau de notaires où la prétendante aux plus hauts tribunaux officiait en tant que secrétaire. Pierre ouvrit le précieux objet : Il sentait le pipi.

Pour la première fois, et peut-être aussi la dernière, le sourire de Juliette fut sincère :

- Tu vas être Papa ! Ricana la goguenarde pas peu fière

Pierre et Juliette, chacun dans l’intimité de leur conscience et sans s’en parler, avouaient n’y avoir jusque là jamais pensé : Pas au bébé mais à leur manque grandissant de pognon ! Oui, l’argent devenait le référent de chaque conversation, le canevas où venait se fondre dans la rancœur la moindre de leurs pensées. Ils savaient comment le dépenser mais bon dieu, leurs parents y étaient pourtant arrivés sans se forcer : Comment emmagasiner plus de blé ?

C’est ce mois d’avril là qu’un homme politique bien en vu et plutôt populaire dans leur immeuble prononça ses mots qui sonnèrent comme LA solution : il fallait travailler plus pour gagner plus. Ce ne fut même pas la peine que Jean-Pierre Pernault en rajoute, le choix était fait. Le slogan était moderne et aussi efficace qu’un pitch de Cold case. Dans la foulée, le couple s’éviterait aussi cette illuminée de gauche qui faisait horreur à chacun de leurs parents. D’ailleurs, Juliette comme sa mère ne supportait pas qu’une femme ait plus de responsabilité qu’elle.

L’élection du président, le 6 mai 2007, ne fut pas spécialement un jour de fête. En fait, Pierre et Juliette, même s’ils avaient voté pour lui, s’en foutaient de ce président. Ce Dimanche là, ils ragèrent de ne pas pouvoir faire de courses pour leur futur bébé : Le King Joujou de la ZAC était fermé.

- Feignants de pauvres ! Grogna Juliette, plus par mimétisme familial que conviction sociale.

Les mois qui suivirent, Pierre et Juliette collectèrent à prix fort mais dilué dans les mensualités, toutes les affaires nécessaires, et bien plus encore, à l’enfant divin qui ferait d’eux des parents heureux comme dans l’épisode final de la dernière saison de Friends qu’ils regardaient régulièrement en dvd sur leur grand écran plasma acheté avec la carte Cofidéga à la grande quinzaine du pouvoir d’achat.

Et l’enfant paru. Faire-Part à papier doré et baptême religieux en grandes pompes pour eux qui ne priaient jamais. Ce jour de célébration familiale fut l’occasion d’afficher l’accomplissement à 23 ans de deux vies de crédit réunies : Le F3 pourri avec son canapé Le Banquerouteur tout en crotte de mamouth, La Soxa dans le parking avec son sticker bébé à bord, le nourrisson customisé aux derniers oripeaux coûteux de la mode puéricultrice telle que détaillée dans le catalogue Verbenêt et l’imposant vaisselier aux faux airs de tombeau de Toutankhamon. Cette journée de baptême en pleine communion avec les imprécations du marché fut le zénith de leur vie, tout ce qui suivrait ne serait plus que déception. C’est qu’ils avaient mis la barre haut : Y avait même des petits fours de chez Lacarie.

- Et tu sais combien ça coûte les macarons de chez Lacarie ? Me demanda Juliette gonflée d’orgueil en me tendant le plateau qui en débordait.

- Non j’en sais rien et j’aime pas ça, par contre si t’as des Pépitos je suis preneur. Lui répondis-je en bon dandy ma coupette de mousseux à la main, légèrement incommodé par la moiteur régnant dans cet appartement me semblant de bien piètre qualité pour le prix d’achat que Pierre m’avait fièrement soufflé.

Ils avaient impressionné. Qui ? je ne sais pas mais ils en étaient persuadés. Pour se payer un tel happening relationnel, le couple avait rogné sur son alimentation depuis des semaines et en avait encore pour des mois de ce régime à base de produits discrètement ramassés à la fin des marchés.

A la fin de l'année, les espoirs du couple, à l’image de la cloison de leur salle à manger, se lézardaient. Pierre et Juliette passaient désormais sans s’arrêter devant les hypermarchés où jadis, quand ils étaient jeunes, ils aimaient se balader des heures en rêvant d’un monde meilleur pour leur intérieur.

Manque de vitamines, de vacances, d’alimentation décente sur fond de pleurs dans un appartement sonore aux reflux de moisi, fuite d’eau surprise, frais de santé pour la petite et cerise sur le pudding, réévaluation du taux d’intérêt pour le taudis virant insalubre : A la mi 2008, juste avant que le marché ne fasse krach-krach alors qu’eux ne le faisaient déjà plus depuis longtemps, c’est peu de dire que Pierre et Juliette était fin prêt pour la grande dépression.

Terrassés, le teint bien livide pour des gens du sud, sous le coût d’un double interdit bancaire, au bord du dépôt de bilan financier et sentimental avec un appartement invendable sur les bras décotant sévère et un gosse pourri gâté qui a un an en sait déjà long sur ses capacités à dominer ses parents : C’est en l’état que je retrouvais Pierre et Juliette dans un restaurant Flounch' de banlieue, par bonheur ouvert un jour férié de novembre 2008, lors de leur première montée dans la région parisienne depuis deux années.

Je sentis une pointe d’amertume lorsque je leur expliquai que la crise financière me touchait peu, pour le moment, puisque, sans emprunt aucun, je vivais déjà chichement depuis dix ans en m’étant habitué sans peine à ne rien désirer de matériel qui ne me soit pas essentiel mais, qu’au fond, si vraiment la situation se dégradait, je n’excluais pas de partir sous d’autres latitudes plus chaleureuses, recommencer tout à zéro du jour au lendemain, histoire d'avoir des choses à raconter dans mes bouquins.

Le départ en appelait un autre. Juliette évoqua alors en larme celui de ses parents.

Ses modèles de toujours l’avait trahie, les fumiers étaient partis s’installer en Inde parce que là-bas avec l’argent qu’ils avaient emmagasiné ici, ils n’auraient pas besoin d’avoir plus de blé pour jouir longtemps d’une retraite dorée !

- Putain, nous la crise, on la prend bien en pleine gueule ! Lança Pierre dépité, comme si ce qui lui arrivait était la faute du grand méchant marché, n’analysant pas même son crime de naïveté et ses multiples récidives.

Adieu le projet d’agence immobilière, adieu le rêve d’une maison avec piscine et jardin, adieu les parents chéris qui les bénissent depuis Pondichéry, adieu le deuxième enfant (ça coûte trop cher ces conneries), adieu Paris, adieu l'hyper, adieu la vie solvable et sans souci. Bonjour l'austère d'une vie à rembourser du crédit.

Pierre et Juliette cherchaient désespérément un modèle à suivre dans les séries télé du moment mais ils n'y voyaient plus que des tueurs en série, des corps disséqués, des gens tournant en rond sur une île déserte ou des femmes divorcées d'un cynisme ultime.

Lapant un baba au rhum pour deux, le couple retrouva tout de même le sourire à l’évocation de mon projet d’article sur les difficultés de la gauche à se trouver un leader qui ne soit pas de droite et des idées qui soient un minimum de gauche.

Juliette prit la main de son homme qui, lui, avait pris vingt ans en l’espace de trois. Ce petit quart de siècle qui, hier comme ce soir, croyait tout savoir, incapable d’analyser son drame mais pouvant citer dans le texte du Jean-François Copé, soupira du fond de sa rancœur, tout de même un peu soulagée :

- Tu te rends compte ce que cela aurait été si Segolène avait gagné… On l’a échappé belle tout de même !

c Seb Musset

11 novembre 2008

La caténaire de la terreur

par
Depuis quelques jours je m’interrogeais sur l’insistance de la presse à en rajouter sur « les actes de malveillance » visant à briser les caténaires des lignes de TGV entraînant des retards de trafic soudainement décrétés "intolérables" par la SNCF.

Si l’on en croit un rapport de la SNCF et sur la base de mon humble expérience personnelle de voyageur (banlieue et province) depuis vingt ans, les
caténaires de la peur n’attendent pas "des actes de malveillance" ni "d'échauffourées en banlieue" encore moins "des tempêtes du siècle" pour tomber régulièrement toutes seules et bloquer des bardées de train durant des heures sans que cela n’entraîne une ligne dans les faits-divers.

Après les interventions du président de la SNCF à la véhémence parfaitement rodée en media-training de crise, après les coups de sang sur site d'un Dominique Bussereau filmé en contre plongé comme Bruce Willis dans DIe Hard II, après la description journalistique appuyée de l’œuvre de ces talibans ferrés qui, en pleine nuit et aux quatre coins du pays, ne ménagèrent pas leurs efforts pour élever à cinq mètres des fers à béton, je me demandais donc légitiment à qui ce chambard de la terreur ferroviaire profitait ?

- A un business de caméra de surveillances qui rongé par la crise avait décidé de jouer du fer sur la caténaire pour décrocher l'épais marché d'un quadrillage vidéo du réseau français ?

- A La SNCF elle-même visant à faire comprendre à l’état qu’il faut de la caillasse pour moderniser son système d’alimentation électrique, aérien et préhistorique, n’attendant que la première pluie pour tomber en panne (fâcheux dans un pays qui se vante d'avoir le train le plus rapide du monde mais où, souvent quand même, il pleut)

- A un commando de fonctionnaires en pré-retraite ulcérés de ne pas pouvoir travailler jusqu’à 70 ans et profitant de leur temps libre pour le faire savoir ?

- Aux syndicats trouvant ici une manière plus jeune et plus musclée de manifester ?

- A Mickael Vendetta accomplissant par là une performance conceptuelle quasi-warholienne : l’adaptation grandeur nature de (ce qu'il a compris de) la Bête humaine ?

Rien de tout cela. Un début de réponse vient de m'être fourni par un communiqué du Ministère de l’intérieur livré sur un plateau aux radios périphériques à l’heure d’écoute maximale tandis que je me dirigeais comme chaque matin, dans mes pantoufles à l'effigie du Che, du lit à la cafetière :

« De dangereux gauchistes autonomes, surveillés depuis des mois, ont été interpellés cette nuit dans le cadre de l’enquête sur les actes de malveillance sur les lignes TGV. »

Fallait y penser.

C’est la faute à l’ultra-gauche.

Racaille du rail ! En pleine période d'unité nationale, un 11 novembre en plus !

Heureusement que dans mon pays où à défaut de loger tout le monde l'on sait faire de beaux trains, l’hyper-droite est là pour veiller au grain.

Update 12.11.08 : La version vidéo avec quelques développements...

8 novembre 2008

signes exterieurs d'intérêt (attention autopromo)

par
Je profite de la reprise d'un de mes billets dans le Vendredi de ce vendredi, de cet article sur le site esprit-riche et de l'effort d'un internaute procédurier pour souligner ma contribution au rayonnement de la francophonie pour vous remercier de vos messages de soutien et de l'intérêt croissant que vous portez à mes chroniques de l'indignation, de la mauvaise humeur et de l'espérance naïve en un monde meilleur. Malgré les apparences, cela me rend bien plus confiant qu'il y a deux ans sur nos capacités de réaction.

7 novembre 2008

Lagarde et mirages

par
Je reviens parmi les vivants. Rien de tel qu'une thérapie par le rire : Je sors peu à peu de ce virus qui m'a cloué au lit trois jours grâce aux petites phrases de Christine Lagarde à la fois précieuse ridicule, femme savante et médecin malgré elle.

A propos de l’élection du premier noir à la présidence des Etats-Unis et sur la probabilité qu’un tel événement survienne en France, Christine Lagarde a ces mots magiques sur France 2 : « Quelque part, ça s'est un peu produit avec l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy. »

Petite précision qui en raconte sur chacun de deux pays : Barack Obama a été élu grâce au sursaut des moins de 30 ans alors que Sarkozy ne doit son trône qu’à la mobilisation moutonnière des plus de 60.

L'après-midi, Christine Lagarde nous offre sa réévaluation mensuelle de la croissance pour l'année prochaine qui restera "positive mais plutôt entre 0.2 et 0.5%". Ce n'est pas tant le chiffre proche du zéro absolu qui compte mais le mot "positif" qui, bien qu'il soit en contradiction avec d'autres analyses, doit rassurer le gentil français. Prochaine étape : Noël avec une réévaluation entre 0.05 et 0.1.

Le soir sur France 3, La ministre de l'économie conclut sa prestation media-trainée face a Carole Gaessler sur un philosophique (mais inquiétant vu son poste) : "Ce qui est certain c'est que personne n'a de certitude" qui me sort des limbes.

Préparer les français à souffir mais sans les alarmer telle est la mission de Christine Lagarde. Petit détail dont l'avocate du gouvernement n'a pas forcément conscience : Beaucoup de français souffrent déjà et depuis un petit moment. Ils n'attendent pas les euphémismes mathématiques des services de communication gouvernementaux pour se reconnaître à titre personnel, familial et professionnel : "'En récession".

Merci Madame Lagarde. Voilà que je me sens revigoré, doté de la force de 1000 Steven Seagal, prêt à tataner à la faucille, au marteau et au coup de boule ce genre d'expérience génétique foireuse du 7e avec sa chemise repassée par maman, se pavanant sur les ruines touristiques de 68 en prétendant que :

5 novembre 2008

Vers un leadership funky !

par

J'ai honte : Je ne partage pas l'orgasme médiatique français (préliminaires des trois dernières semaines + coït de cette nuit) concernant l'élection de Barack Obama à la présidence des Etats-Unis. Notons que pour les tv et radios françaises et si l'on s'en tient à la localisation de leurs principaux directs, l'Amérique se restreint à Manhattan et encore, entre le 42e et la 50e rue au niveau de la 7e avenue.

Les raisons de mon amertume ? Premièrement, j'étais malade (trop de Bud avec mes burgers et mes frites Mc Cain au Planet Hollywood) et, rien à faire, cette nuit blanche du 4 novembre gardera à jamais un arrière-gout de vomi.

Deuxièmement, malgré qu'Obama soit le premier président américain a écouter la même musique que moi et que je me réjouisse de l'avancée sociétale que son accession aux plus hautes responsabilités représente, cette success story à pépites de grand-mère cancéreuse que l’on nous rabâche depuis des mois, le tout sur fond de facebook et de SMS, avec un bouquet final sous la forme pré-totalitaire d'un infommercial de 26 minutes simultanément diffusé en prime-time sur les principaux networks, passe mal.

Barack Obama est le fabuleux cygne noir à l'apparence super-cool qui prouve que les États-Unis ne sont plus au bord mais bien au fond de la cuvette. Je précise que j'aurais voté pour lui, sans grande illusion, si j'avais été concerné par ce scrutin.

Communication, économie et guerre sont les trois rênes du règne américain. La guerre est un fiasco, l’économie ne va pas mieux, reste la com' : l’iconographie et ses symboles. Le nouveau président génère de l’image et suscite à nouveau du rêve là où il n’y avait pour beaucoup à travers le monde plus que rejet et haine.
Comme un Tony Blair en son temps, entreprenant une fructueuse campagne de marketing pour une Angleterre en crise, Obama fait encore mieux que Rocky IV et les spots Levis pour l'image de son pays à l'étranger. Il le dit lui même : Son élection doit restaurer la confiance dans le modèle américain, ce dont le marché a diablement besoin.

Au-delà de l'espoir d'un "changement" (bon vieux classique électoral), Barack clôt en fanfare un épais chapitre : Celui de la suprématie de l’Amérique que nous et nos parents avons connu. Voila le vrai changement que peu de nos médias conservateurs et serviles ont évoqué.

Une chose est acquise : Les espérances sont hautes. Sa présidence se doit d'être aussi révolutionnaire que son élection et dans un bref délais. J'ai presque envie d'y croire.

Sur une note
franco-française, le fait qu’Obama soit le favori de mon président et de ses teckels à tee-shirts obamaniaques de type Frédéric Lefebvre me le rend, de fait, moins attachant. Et puis, il parait que l'homme a tout piqué à la communication sarkozienne.

Précisons pour calmer les esprits que la problématique immobilière aura surement plus compté que la couleur de peau du nouveau président américain :
Ici on a eu "La France de propriétaires", là-bas on a une Amérique qui veut le rester.

Précisons aussi que l'Amérique reste cette terre d'opportunités où tout est possible quand on dispose de montagnes de cash et du soutien de la majorité des médias.

On the bright side...

Comme vous je connais un peu La France et je reste convaincu que pour certains (bien plus que 7%) derrière l'emballement mimétique, cette élection est un bug-system.
En ce matin du 5 novembre 2008, j’imagine avec délice les têtes interdites de ces pépères au racisme honteux qui cimentent nos belles régions et qui sont toujours ponctuels aux bureaux de vote. Pour eux, bien qu'ils ne s'étendent pas trop sur le sujet, le noir est au choix, un génie du foot ou un apathique tout juste bon à nettoyer le carrelage à La Javel à condition qu’on lui hurle bien dessus, bref un ingrat qui ne se rend pas compte de la chance qu'il a d'avoir eu des aïeux colonisés par L'empire Français.

Je salive également d’avance en songeant au contraste que provoquera une visite du premier chef d’état noir de la plus grande puissance mondiale (où l’apartheid lynchait son plein il y a encore 50 ans) dans notre bonne vieille république des lumières blafardes avec des Brice Hortefeux comme gestionnaire des flux, une seule députée représentant "la diversité" dans l'hémicycle et pour unique variante de couleur gouvernementale sa Rama Yade d'agrément (non élue). Le siège éjectable de Rachida Dati est quant à lui déjà enclenché.

Je laisse donc aux autres le soin de gloser sur cette nuit du 4 novembre, d'autant que je sens que ma tasse de tilleul-menthe est actuellement en ballottage interne défavorable, et conclurai avec quelques extraits de cette bonne parole populaire française (qui à en croire RMC n'a pas connu une telle joie collective depuis la victoire à La coupe du Monde de football en 1998) entendus dans la bouche de deux adolescents à la sortie du bus 95 :

- Ouais super un président Ke-bla comme dans Deep Impact !

- Ouais c'est comme dans 24 heures !

It's all entertainment folks !

(Pour info dans 24 heures, le président meurt assassiné dans le premier épisode de la saison 5 et dans Deep Impact, les Etats-Unis terminent ravagés par un météorite géant.)


3 novembre 2008

La fête des morts (version UMP)

par
Il y eut les droits de l'homme, les droits de la femme, les droits de l'enfant, il y a désormais le droit du retraité à mourir au travail le plus tard possible. Remercions L'UMP pour ses régulières et humanistes contributions visant à faire progresser (à coups de pied au cul) le corps social sur la voie de l'émancipation !

Cet amendement (si logique au moment où le chômage des jeunes repart à la hausse et si sûr de lui qu'il a été voté à la va-vite par des députés préssés la nuit précédant un jour férié)
vise à court terme la classe d'âge 60-65 ans d'entrepreneurs (grands et petits) actifs mais vieillissants et autres cadres ornementaux à bas rendement et bonne rémunération. Autant de catégories promptes à voter UMP mais pouvant se montrer déçues à la découverte du montant de leurs retraites face aux errances friquées de leur poulain moins populaire et risquant de lui signifier dans les urnes en 2012. Il convenait d'agir. C'est que l'insistance de L'UMP, via ses portes flingues robotisés, à tirer systématiquement sur l'ambulance du PS cache mal les dissensions internes rongeant le parti bleu et sa base se souhaitant pour chacun un mentor sachant tenir sa droite.

Pour l'autre partie des supporters UMP, ceux qui ne travaillent déjà plus, il en ira du "droit à la retraite à 70 ans" comme du "droit au travail le dimanche pour les autres" ainsi que de la défiscalisation de leurs aides à domicile ou, l'espoir n'est pas perdu, de la mise au bûcher de Martine Aubry : Ce sera une occasion supplémentaire de sabler le Champagne !

Pour résumer leur état d'esprit, je vous invite à lire ce petit billet du "blog social" de Marc Landré, concis et pourtant garanti 100% mauvaise foi (en même temps c'est hébergé par Le Figaro) . Non content d'esquiver le problème en basant son constat sur le nombre de plus de 65 ans qui travaillent aujourd'hui (3%), le bloggeur social du Figaro en profite pour tacler le PS (vraiment les gros cons !) et fait l'impasse sur ceux les plus affectés à long terme par cette pseudo incitation. Je parle bien sûr de la classe moyenne en aller-simple vers la paupérisation (aujourd'hui âgée de 20 à 50 ans) qui, le temps qu'elle a arrive à 70 ans, verra ce "droit facultatif" transformé en devoir impératif.

Enfin.... si son espérance de vie n'a pas diminué d'ici là pour cause de "droit à la sécurité sociale optionnelle".


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